Observations préliminaires sur l'état de l'accès à l'information et priorités visant à améliorer la transparence du gouvernement

Forum des commissaires à l'information et à la protection de la vie privée

par Caroline Maynard, commissaire à l'information Canada

Le 14 septembre 2018
Regina (Saskatchewan)

(Le discours prononcé fait foi)


Bonjour à tous,

J'aimerais commencer par féliciter le commissaire à l'information et à la protection de la vie privée de la Saskatchewan, Ron Kruzeniski, qui a organisé avec succès une réunion des commissaires à l'information et à la protection de la vie privée des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux au début de la semaine. Merci, Ron, d'avoir été un hôte si aimable et de m'avoir invitée à prolonger ma visite et à vous parler aujourd'hui.

Je ne peux vous dire à quel point il est utile pour moi de rencontrer des gens qui travaillent dans le domaine de l'accès à l'information et de la transparence gouvernementale, surtout au cours des premiers mois de mon mandat à titre de commissaire à l'information du Canada.

Puisqu'il s'agit de ma première visite en Saskatchewan à titre de commissaire à l'information et que je n'ai pas rencontré un bon nombre d'entre vous, permettez-moi de vous parler brièvement de moi avant de vous parler de mes priorités.

J'ai été nommée commissaire à l'information du Canada au début de mars 2018 pour un mandat de sept ans. Avant cette nomination, j'ai travaillé au sein d'organismes indépendants chargés d'examiner les griefs présentés par les membres de la GRC et des Forces armées canadiennes.

Mon travail quotidien au sein de ces organismes m'a donné un aperçu de la façon de répondre aux besoins des personnes, tout en assurant un examen approfondi, efficace et impartial. À titre de conseillère juridique et de présidente intérimaire du Comité externe d'examen des griefs militaires, j'ai souvent été appelée à appliquer les lois sur l'accès à l'information ou sur la protection de la vie privée. Mon intérêt pour l'accès à l'information, mon expérience en tant que leader et dirigeante dans une institution indépendante et mes antécédents juridiques m'ont convaincue que le poste de commissaire pourrait me convenir.

Mes six premiers mois en tant que commissaire à l'information ont passé en un clin d'œil. Pendant ce temps, j'ai rencontré tout mon personnel pour comprendre comment nous menons nos enquêtes et autres opérations. J'ai également rencontré de hauts fonctionnaires pour discuter de leurs problèmes et préoccupations, vérifier leurs relations avec mon bureau et comprendre le fonctionnement interne de l'accès à l'information dans les institutions fédérales qu'ils dirigent. J'ai également rencontré divers intervenants, notamment des professionnels de l'accès à l'information, des groupes autochtones, des journalistes et des plaignants pour comprendre leur expérience en matière d'accès à l'information et obtenir leurs points de vue sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

Et qu'est-ce que j'ai appris? Premièrement, j'ai rapidement découvert que j'ai une équipe solide et polyvalente qui m'appuie au Commissariat à l'information, et qui a une grande expertise sur laquelle je peux compter.

Deuxièmement, je fais confiance aux cadres dirigeants de l’administration publique lorsqu’ils me disent qu’ils croient fortement à l’accès à l’information et au respect de la loi. Ils sont ouverts à l’idée d’utiliser leur pouvoir discrétionnaire pour offrir cet accès. Ceci étant dit, l’expérience au sein de mon bureau montre que ce message ne se rend pas toujours jusqu’aux coordonnateurs de l’AIPRP et aux experts en la matière qui traitent les demandes. Cette réalité est à la base de l’une des priorités que je vais aborder sous peu. 

Troisièmement, les intervenants du régime d'accès à l'information sont très passionnés par l'accès à l'information. Je suis impressionnée par la détermination avec laquelle ils souhaitent plus d'information, plus de transparence et plus de participation. Je peux vous assurer que j'écoute ce qui se dit à l'extérieur et que j'apprécie cet apport.

En me fondant sur ce que j'ai appris, j'ai établi quatre grandes priorités pour la première partie de mon mandat.

Ma première priorité est la plus urgente pour notre bureau. Nous avons un arriéré de plaintes très important, qui risque d'augmenter. Dans mon bureau, cet arriéré s'élève maintenant à 3 500 plaintes, ce qui représente une augmentation de 23 p. 100 par rapport à l'année précédente.

En tant que dirigeante, je dois me concentrer sur mon mandat opérationnel, qui consiste essentiellement à enquêter sur les plaintes. Heureusement, j'ai à la fois un vif intérêt et une grande expérience en la matière. Je suis aussi une grande partisane de l'amélioration continue – je crois qu'il faut réexaminer régulièrement les processus et remettre en question le statu quo.

Afin de progresser rapidement, j'ai apporté quelques changements simples à notre processus d'enquête peu de temps après mon entrée en fonction à titre de commissaire.

L'un des premiers changements a été la création d'une équipe de triage pour traiter les retards dans le règlement des plaintes. Cette équipe examine les nouveaux dossiers dès leur arrivée et discute avec les plaignants pour confirmer leurs attentes et les échéanciers. Ce processus s'est avéré utile, car il fournit un point de contact initial et l'occasion de préciser les détails de la demande.

En plus de l'équipe de triage, j'ai également décidé de faire participer notre équipe juridique plus tôt dans le processus d'enquête, de réduire la taille de nos équipes d'enquête et de passer à un environnement sans papier. 

Grâce à ces changements, je suis très heureuse d'annoncer que mon bureau a réglé 806 plaintes au cours du présent exercice, soit 160 de plus que celles que nous avons reçues. Si nous pouvons continuer sur cette lancée, nous aurons réglé 2 400 dossiers d'ici la fin mars prochain.

Et nous ne nous arrêterons pas là. Nous devons continuer à rationaliser davantage nos opérations.

Notre prochaine étape est un examen complet de notre processus d'enquête, qui est en cours.

Je travaille également avec mes directeurs pour embaucher et former de nouveaux enquêteurs. Le budget fédéral de 2018 prévoyait un financement de 2,9 millions de dollars pour mon bureau. Malheureusement, ce financement est pour une année seulement. Nous avons déjà entrepris de pourvoir les postes permanents vacants et d'embaucher des consultants expérimentés afin de pouvoir régler un plus grand nombre de plaintes au cours du présent exercice.

Ma deuxième priorité est de préparer la mise en œuvre du projet de loi C-58, qui modifiera et mettra à jour la Loi sur l'accès à l'information du gouvernement fédéral.

Le projet de loi C-58 est maintenant devant le Sénat et je m'attends à comparaître devant le comité chargé de l'étudier afin de faire connaître mon point de vue sur les modifications proposées.

Mon équipe et moi travaillons déjà sur de nouveaux processus pour gérer les modifications à la Loi. Nous sommes également en train d'élaborer des directives pour expliquer comment nous allons mettre en œuvre ces modifications.

Il y a deux modifications importantes qui auront des répercussions très probablement sur notre travail. 

La première modification est l'article proposé du projet de loi qui permettrait aux institutions fédérales de refuser de traiter une demande d'accès si :

  • un document identique a déjà été communiqué au demandeur;
  • la demande concerne un grand nombre de documents ou exige une recherche parmi de nombreux documents;
  • la demande est vexatoire ou entachée de mauvaise foi, ou constitue autrement un abus du droit d'accès.

La mise en garde est qu'une institution ne peut refuser de traiter une demande sans l'approbation du commissaire à l'information. Par conséquent, ces dossiers devront être traités rapidement par mon bureau afin de garantir le droit des demandeurs à accès rapide.

La deuxième modification importante est que le projet de loi me donnerait la capacité d'émettre et de publier des ordonnances, plutôt que de me limiter à émettre des conclusions et des recommandations comme c'est le cas actuellement.

Mon équipe cherche à mettre en place une base de données consultable sur notre site Web qui permettra aux Canadiens, aux institutions et aux parties prenantes de trouver les nouvelles ordonnances, ainsi que les nouvelles conclusions et directives. À mon avis, cela profitera à tout le monde, car cela précisera les positions du bureau dans des cas particuliers et donnera lieu à une plus grande uniformité dans l'ensemble du système.

Cela m'amène à ma troisième priorité, qui est de veiller à ce que le travail quotidien de mon bureau soit ouvert et transparent. Je vois cette priorité sous l'angle d'un gouvernement ouvert, qui encourage les institutions gouvernementales, comme la mienne, à devenir plus transparentes, plus responsables et plus réceptives, dans le but ultime d'améliorer la qualité de la gouvernance ainsi que la qualité des services qu'elles fournissent.

Par conséquent, mon objectif concernant cette priorité est de rendre le processus d'enquête sur les plaintes aussi simple et transparent que possible. Je veux que nos interprétations de la Loi et notre processus d'enquête soient clairs afin que les Canadiens et les institutions puissent facilement comprendre notre position.

Nous fournirons des mises à jour plus rapidement sur l'information touchant notre bureau et le régime d'accès à l'information. Nous communiquerons aussi clairement tout nouveau processus ou toute nouvelle attente aux institutions et au public.

Ma quatrième et dernière priorité consiste à collaborer étroitement avec les institutions pour les aider à respecter leurs obligations en vertu de la Loi et à surmonter les obstacles à l’accès au sein du système. Dans cette optique, j’ai rencontré les dirigeants des institutions, et je compte faire en sorte que leur engagement et leur bonne volonté à l’égard de mon bureau se traduisent par de véritables résultats pour les demandeurs.

En tant qu’ancien commissaire aux langues officielles, Graham Fraser m’a dit récemment que nous devons établir un modèle de comportement que nous voulons que les institutions adoptent. Plutôt que la confrontation et le conflit, qui sont parfois un sous-produit de l’idée de « tenir une personne responsable de ses actes », le ton que j’adopte, à la fois au sein de ma propre organisation et dans mes relations avec les institutions, est celui de l’ouverture. Je pense que nous pouvons tous convenir que le fait d’interagir les uns avec les autres de manière directe et constructive est la meilleure façon de procéder.

Par exemple, mon bureau adopte une approche équilibrée concernant la manière dont nous présentons les conclusions d’une enquête dans nos rapports annuels, de manière à pouvoir encourager et reconnaître le bon travail effectué par les institutions, tout en fournissant une orientation à ces institutions lorsqu’une amélioration est requise.  

En tant que commissaire à l'information, je me réjouis de collaborer avec ces responsables dans le cadre de nouvelles initiatives visant à améliorer leur travail quotidien. De nouvelles idées ont déjà germé, comme la possibilité de professionnaliser les rôles des responsables de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels, comme ce qui a déjà été fait dans les collectivités des finances et des ressources humaines.

J'aimerais également travailler avec le gouvernement pour voir si nous pouvons trouver un moyen de créer des bassins communs de professionnels de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels afin que les institutions évitent le « braconnage » de ressources.
Je suis certaine qu'il y a d'autres idées semblables au sein de la collectivité, et je vous encourage à les communiquer afin que je puisse apporter mon soutien là où je le peux.

Il s'est passé beaucoup de choses depuis mes débuts comme commissaire à l'information. Et les événements marquants s'enchaînent : La Semaine du droit à l'information, qui se déroule cette année du 24 au 30 septembre, approche à grands pas. Ce sera ma première cérémonie en tant que commissaire, et j'ai hâte de travailler avec mes homologues provinciaux et territoriaux pour sensibiliser les gens à l'importance de l'accès à l'information.

Je pense que nous avons mis sur pied une variété intéressante d'activités pour la Semaine. J'ai particulièrement hâte de tenir une discussion informelle sur l'accès à l'information en partenariat avec l'École de la fonction publique du Canada, à laquelle tout le monde peut assister par webdiffusion. Les activités de la semaine se termineront le 28 septembre par la Journée du droit à l'information, où je participerai à une discussion dans le cadre du libre accès à l'information « FOI Friday », animée par Dylan Robertson du Winnipeg Free Press et diffusée en direct sur le site Web de la page Facebook de l'Association canadienne des journalistes. Les détails sur chacun des événements se trouvent sur le site Web Le droit à l'information.

Je voudrais faire une dernière observation en tant que nouvelle commissaire avant de conclure aujourd'hui. Malgré toutes les difficultés que j'ai vues, je suis très encouragée par tout ce que nous réalisons. Des conférences comme celle d'aujourd'hui, ou les réunions auxquelles je viens d'assister avec mes collègues commissaires, ou les réunions régulières que j'ai eues avec les dirigeants du gouvernement m'indiquent qu'il est possible, si nous travaillons tous ensemble et si nous nous respectons les uns les autres, de promouvoir une culture de transparence dans la fonction publique et à mieux faire comprendre l'importance de l'accès à l'information.

Je vous remercie.

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