Parcs Canada (Re), 2023 CI 26

Date : 2023-09-26
Numéro de dossier du Commissariat : 5822-03293
Numéro de dossier de l’institution : A-2021-00090

Sommaire

La partie plaignante allègue que Parcs Canada a erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu du paragraphe 19(1) (renseignements personnels), des alinéas 21(1)a) (avis ou recommandations), 21(1)b) (comptes rendus de consultations ou de délibérations) et 21(1)c) (positions ou plans élaborés pour des négociations), et de l’article 23 (privilège relatif à un litige) de la Loi sur l’accès à l’information. La demande d’accès vise des documents se rapportant à Benga Mining ou au projet de mine de charbon Grassy Mountain ainsi qu’à des communications les concernant (notamment des documents internes ayant trait à celles-ci) échangées entre l’institution et l’Alberta Energy Regulator. La plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.

Durant le traitement de sa demande, la partie plaignante a précisé qu’elle ne souhaitait pas obtenir de renseignements ne se rapportant pas à Benga Mining ou au projet de mine de charbon Grassy Mountain. La Commissaire à l’information est d’avis que, compte tenu des faits particuliers de l’espèce, il était justifié pour Parcs Canada de ne pas traiter, en tout ou en partie, les documents auxquels la partie plaignante avait consenti à ce qu’ils ne soient pas considérés comme faisant partie de la réponse à sa demande.

Au cours de l’enquête, Parcs Canada a divulgué une partie d’un document non communiqué initialement en vertu de l’alinéa 21(1)a). La Commissaire est d’avis que les autres renseignements qui continuent de faire l’objet d’un refus de communication en vertu du paragraphe 19(1), de l’alinéa 21(1)a) et de l’article 23 satisfont aux critères des exceptions.

La plainte est fondée.

Plainte

[1]     La partie plaignante allègue que Parcs Canada a erronément refusé de communiquer des renseignements, en vertu du paragraphe 19(1) (renseignements personnels), des alinéas 21(1)a) (avis ou recommandations), 21(1)b) (comptes rendus de consultations ou de délibérations) et 21(1)c) (positions ou plans élaborés pour des négociations), et de l’article 23 (privilège relatif à un litige) de la Loi sur l’accès à l’information. La demande d’accès vise des documents se rapportant à Benga Mining ou au projet de mine de charbon Grassy Mountain ainsi qu’à des communications les concernant (notamment des documents internes ayant trait à celles-ci) échangées entre l’institution et l’Alberta Energy Regulator.

[2]     Durant le traitement de sa demande, la partie plaignante a précisé que, mis à part les renseignements sur l’Alberta Energy Regulator et/ou Benga Mining ou le projet de mine de charbon Grassy Mountain, elle ne souhaitait pas obtenir de documents, en tout ou en partie, comportant des renseignements sur d’autres personnes ou organisations. De ce fait, Parcs Canada a retranché ou caviardé les renseignements qui ne concernaient pas l’Alberta Energy Regulator et/ou Benga Mining ou le projet de mine de charbon Grassy Mountain, puisqu’ils sont « non pertinents » en l’espèce. Au cours de l’enquête, la partie plaignante a exprimé certaines préoccupations quant au retrait des renseignements « non pertinents » des documents communiqués.

[3]     La plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.

Enquête

[4]     Lorsqu’une institution refuse de communiquer des renseignements en vertu d’une exception, il lui incombe de démontrer que ce refus est justifié.

[5]     Le 6 juillet 2023, Parcs Canada a communiqué des renseignements se trouvant à la page 208 des documents en raison du temps qui s’était écoulé. Ces renseignements faisaient l’objet d’un refus de communication en vertu de l’alinéa 21(1)a) au moment de la réponse. Il a maintenu son refus de communiquer les autres renseignements en vertu du paragraphe 19(1), des alinéas 21(1)a), 21(1)b) et 21(1)c), et de l’article 23.

Paragraphe 19(1) : renseignements personnels

[6]     Le paragraphe 19(1) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements personnels.

[7]     Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :

  • les renseignements concernent une personne, c’est-à-dire un être humain, et non une société;
  • il y a de fortes possibilités que la divulgation de ces renseignements permette d’identifier cette personne;
  • les renseignements ne sont pas assujettis à une des exceptions prévues aux alinéas 3j) à 3m) de la Loi sur la protection des renseignements personnels applicables à la définition de « renseignements personnels » (p. ex. les coordonnées professionnelles des fonctionnaires).

[8]     Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions doivent alors se demander si les circonstances suivantes [énumérées au paragraphe 19(2)]     existent :

  • la personne concernée par les renseignements consent à leur divulgation;
  • les renseignements sont accessibles au public;
  • la communication des renseignements serait conforme à l’article 8 de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[9]     Lorsqu’une ou plusieurs de ces circonstances existent, le paragraphe 19(2) de la Loi sur l’accès à l’information exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider si elles doivent communiquer ou non les renseignements.

L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?

[10]     Parcs Canada a présenté des observations au Commissariat à l’information selon lesquelles les renseignements visés par l’exception correspondent aux renseignements personnels d’une personne identifiable, autre que la partie plaignante, et qu’ils ne font pas l’objet d’une des exceptions prévues par la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[11]     Je conclus que les renseignements satisfont aux critères du paragraphe 19(1).

La communication est-elle justifiée en vertu du paragraphe 19(2)?

[12]     Étant donné que les renseignements satisfont aux critères du paragraphe 19(1), Parcs Canada était tenu d’exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 19(2) afin de décider de communiquer ou non les renseignements lorsqu’au moins l’une des circonstances décrites au paragraphe 19(2) existait au moment de la réponse.

[13]     Parcs Canada a fourni une justification détaillée expliquant pourquoi les circonstances du paragraphe 19(2) n’existaient pas en l’espèce :

  • il a donné des motifs précis expliquant pourquoi il n’aurait pas été approprié de demander le consentement de la personne que les renseignements personnels concernent;
  • il a montré que le public n’y a pas accès;
  • il a démontré que la communication des renseignements n’est pas conforme à l’article 8 de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[14]     Je conclus que les circonstances énoncées au paragraphe 19(2) n’existaient pas au moment où Parcs Canada a répondu à la demande d’accès. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner la question qui a trait au pouvoir discrétionnaire.

Alinéa 21(1)a) : avis ou recommandations

[15]     L’alinéa 21(1)a) permet aux institutions de refuser la divulgation d’avis ou de recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre.

[16]     Pour que cette exception s’applique, les documents qui contiennent les renseignements doivent avoir été créés moins de vingt ans avant la demande d’accès.

Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :

  • les renseignements sont des avis ou des recommandations;
  • les renseignements ont été élaborés pour une institution fédérale ou un ministre.

[17]     Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions doivent alors exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements.

[18]     Toutefois, le paragraphe 21(2) interdit expressément aux institutions d’invoquer l’alinéa 21(1)a) pour refuser de communiquer ce qui suit :

  • des documents qui contiennent les motifs ou les comptes rendus de décisions qui touchent les droits d’une personne prises par les institutions dans l’exercice de leurs pouvoirs discrétionnaires ou dans l’exercice de leurs fonctions judiciaires ou quasi judiciaires;
  • des rapports établis par des consultants ou des conseillers qui n’étaient pas, au moment où ces rapports ont été établis, des administrateurs, des dirigeants ou des employés d’une institution ou des membres du personnel du ministre.

L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?

[19]     L’alinéa 21(1)a) a été invoqué pour refuser de communiquer des renseignements se trouvant aux pages 267, 268, 306 et 307 des documents. Ces renseignements consistent en des extraits de présentations données lors de deux réunions distinctes du comité d’évaluation d’impact, l’une se tenant avant la publication d’un rapport de la commission d’examen conjoint sur le projet de mine de charbon Grassy Mountain et l’autre, après celle-ci. Certains des renseignements avaient été refusés simultanément en vertu des alinéas 21(1)b) et/ou 21(1)c).

[20]     Je conviens que les renseignements se trouvant aux pages 267 et 268 ainsi qu’aux pages 306 et 307 consistent en des avis et des recommandations.

[21]     Les employés de divers ministères et organismes, tout comme le comité d’évaluation d’impact, ont formulé et présenté des avis et des recommandations aux hauts fonctionnaires de divers ministères et organismes ayant assisté aux réunions du comité.

[22]     Parcs Canada a démontré que les renseignements consistent en des avis et des recommandations élaborés par une institution fédérale et pour celle-ci. De plus, les documents ont été créés moins de vingt ans avant la demande d’accès.

[23]     En ce qui concerne les renseignements se trouvant à la page 208, Parcs Canada a continué de faire valoir qu’ils satisfont aussi aux critères de l’alinéa 21(1)a), mais a accepté de les communiquer au cours de l’enquête en raison du temps qui s’était écoulé. Bien que la page 208 ait été communiquée, il convient de préciser que Parcs Canada n’a pas fourni d’observations suffisantes susceptibles de me convaincre que les renseignements satisfont aux critères de l’exception prévue à l’alinéa 21(1)a); j’aurais ordonné leur communication.

[24]     Par conséquent, je suis maintenant d’avis que les autres renseignements qui continuent de faire l’objet d’un refus de communication satisfont aux critères de l’alinéa 21(1)a).

L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?

[25]     Étant donné que les renseignements se trouvant aux pages 267 et 268 ainsi que 306 et 307 satisfont aux critères de l’alinéa 21(1)a), Parcs Canada devait exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non l’information. Pour ce faire, il devait prendre en considération tous les facteurs pertinents pour ou contre la communication.

[26]     Parcs Canada a démontré qu’il a pris en considération les facteurs pour ou contre la communication des renseignements, y compris l’objet de la Loi, notamment la transparence des activités du gouvernement. Il a aussi pris en considération les conséquences de la communication de stratégies gouvernementales, plus particulièrement la question de savoir si cette communication porterait préjudice à sa capacité de tirer parti de ces stratégies à l’avenir. Parcs Canada a conclu que le préjudice découlant de cette communication l’emportait sur les facteurs en faveur de la communication des renseignements.

[27]     Je conclus que Parcs Canada a pris en considération tous les facteurs pertinents lorsqu’il a décidé de ne pas communiquer les renseignements. Par conséquent, j’estime que le pouvoir discrétionnaire exercé par Parcs Canada était raisonnable.

[28]     Puisque les renseignements satisfont aux critères de cette exception, il n’est pas nécessaire d’examiner l’application des alinéas 21(1)b) et 21(1)c) pour refuser la communication des mêmes renseignements.

Article 23 : privilège relatif à un litige

[29]     L’article 23 permet aussi aux institutions de refuser de communiquer des renseignements protégés par le privilège relatif au litige lorsque l’information a été préparée ou recueillie aux fins d’un litige.

[30]     Pour invoquer cette exception relativement à un litige, les institutions doivent démontrer ce qui suit :

  • les renseignements ont été préparés ou recueillis dans le but principal d’un litige;
  • le litige est en cours ou peut être raisonnablement appréhendé.

[31]     Le privilège relatif au litige prend fin généralement lorsque le litige est terminé, sauf lorsqu’un litige connexe est en instance ou est raisonnablement appréhendé.

[32]     Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions (à qui appartient le privilège) doivent alors exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements.

L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?

[33]     Parcs Canada a invoqué l’article 23 pour refuser de communiquer les pages 1 à 47 des documents dans leur intégralité. Il a démontré que les documents en cause ont été préparés dans le but principal d’un litige et que tous les éléments matériels en cause font toujours l’objet d’un litige.

[34]     Compte tenu de l’explication fournie, je suis d’avis que les renseignements dont la communication a été refusée en vertu de l’article 23 satisfont aux critères de l’exception.

L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?

[35]     Étant donné que les renseignements satisfont aux critères de l’article 23, Parcs Canada devait exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non l’information. Pour ce faire, il devait prendre en considération tous les facteurs pertinents pour ou contre la communication.

[36]     Parcs Canada a mentionné qu’il avait pris en considération l’objet de la Loi, notamment la transparence, dans sa décision. Cependant, il a conclu que la communication des renseignements nuirait aux positions juridiques du gouvernement dans le cadre du litige en cours. Parcs Canada a conclu que les préjudices découlant de cette communication, y compris la nature délicate des renseignements et les circonstances du litige, l’emportaient sur les facteurs en faveur de la communication des renseignements.

[37]     Compte tenu de ce qui précède, j’accepte que Parcs Canada a raisonnablement exercé son pouvoir discrétionnaire en prenant en considération les raisons pour et contre la communication dans sa décision.

Documents non pertinents

[38]     Au cours de l’enquête, Parcs Canada a mentionné que la partie plaignante consentait explicitement à ce que, mis à part les renseignements sur l’Alberta Energy Regulator et/ou Benga Mining ou le projet de mine de charbon Grassy Mountain, il n’était pas nécessaire de traiter les documents comportant des renseignements sur d’autres personnes ou organisations. La partie plaignante a reconnu ce fait. Par conséquent, Parcs Canada a caviardé ce type de renseignements dans les documents, estimant qu’ils étaient « non pertinents » par rapport à la demande de la partie plaignante.

[39]     Après avoir examiné les documents pertinents, je suis d’avis que les renseignements désignés comme étant « non pertinents » sont des renseignements concernant des personnes ou des organisations autres que l’Alberta Energy Regulator et/ou Benga Mining ou le projet de mine de charbon Grassy Mountain. Étant donné que Parcs Canada disposait d’une déclaration écrite de la part de la partie plaignante selon laquelle cette dernière ne souhaitait pas obtenir ces autres renseignements, je constate qu’ils n’ont pas été traités. Cela signifie que les tiers potentiels n’ont pas été consultés et que certaines exceptions n’ont pas été prises en considération, puisque les renseignements en question ont simplement été retranchés de la réponse du fait qu’ils n’étaient pas pertinents en l’espèce. À la lumière de ce qui précède, il serait injuste pour Parcs Canada, à ce stade, de modifier la portée de la demande à laquelle la partie plaignante avait consenti. De plus, lorsque la partie plaignante a été invitée à présenter des observations pour expliquer pourquoi, dans ces circonstances, Parcs Canada aurait dû traiter ou communiquer les renseignements supplémentaires, elle ne l’a pas fait.

[40]     Je suis d’avis que, compte tenu des faits particuliers de l’espèce, il était justifié pour Parcs Canada de ne pas traiter, en tout ou en partie, les documents auxquels la partie plaignante, au départ, avait consenti explicitement à ce qu’ils ne soient pas considérés comme faisant partie de la réponse à sa demande. Si la partie plaignante souhaite obtenir ces renseignements supplémentaires, elle a le droit de présenter une nouvelle demande que Parcs Canada traitera conformément à la Loi.

Résultat

[41]     La plainte est fondée.

Bien que j’estime que les renseignements se trouvant à la page 208 ne satisfont pas aux critères de l’alinéa 21(1)a), je constate qu’ils ont déjà été communiqués. Par conséquent, il n’est plus nécessaire de rendre une ordonnance.

Lorsque la plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a), b), c), d), d.1) ou e) de la Loi, la partie plaignante a le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. La partie plaignante doit exercer ce recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables après la date du compte rendu et doit signifier une copie de sa demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43.

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