Office des transports du Canada (Re), 2025 CI 26
Date : 2025-04-01
Numéro de dossier du Commissariat : 5822-05662
Numéro de la demande d’accès : A-2022-00012
Sommaire
La partie plaignante allègue que l’Office des transports du Canada (OTC), en réponse à une demande d’accès, a erronément refusé de communiquer des renseignements en vertu de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers), de l’alinéa 20(1)c) (pertes ou profits financiers d’un tiers), de l’alinéa 20(1)d) (négociations d’un tiers), l’alinéa 21(1)a) (avis ou recommandations), l’alinéa 21(1)(b) (comptes rendus de consultations ou de délibérations) et l’article 23 (secret professionnel de l’avocat et privilège relatif à un litige) de la Loi sur l’accès à l’information . La demande vise des documents relatifs au dossier no 17‐05835. L’allégation s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.
Les parties n’ont pas démontré que les critères des exceptions appliquées étaient satisfaits en ce qui concerne les renseignements de tiers ou un échange d’avis dont la communication a été refusée en vertu de l’article 23.
La Commissaire à l’information a ordonné à l’OTC de communiquer certains renseignements pour lesquels les parties n’ont pas démontré que les critères des exceptions étaient satisfaits et d’exercer de nouveau son pouvoir discrétionnaire en prenant en considération tous les facteurs pertinents concernant les renseignements dont il avait le droit de refuser la communication en vertu de l’alinéa 21(1)b) et de l’article 23. L’OTC a avisé la Commissaire qu’il donnerait suite à l’ordonnance. La plainte est fondée.
Plainte
[1] La partie plaignante allègue que l’Office des transports du Canada (OTC), en réponse à une demande d’accès, a erronément refusé de communiquer des renseignements en vertu de l’alinéa 20(1)b) (renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers), de l’alinéa 20(1)c) (pertes ou profits financiers d’un tiers), de l’alinéa 20(1)d) (négociations d’un tiers), l’alinéa 21(1)a) (avis ou recommandations), l’alinéa 21(1)(b) (comptes rendus de consultations ou de délibérations) et l’article 23 (secret professionnel de l’avocat et privilège relatif à un litige) de la Loi sur l’accès à l’information . La demande vise des documents relatifs au dossier no 17‐05835. L’allégation s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.
[2] Au cours de l’enquête, la partie plaignante a décidé qu’il n’était plus nécessaire que le Commissariat à l’information fasse enquête sur l’application des alinéas 20(1)b), 20(1)c) ou 20(1)d), sauf aux pages 1, 13, 16-17 et 21.
Enquête
[3] Lorsqu’une institution refuse de communiquer les renseignements d’un ou des tiers, il incombe à ces tiers et/ou à l’institution de démontrer que ce refus est justifié.
[4] Le 2 décembre 2024, l’OTC a divulgué des renseignements factuels se trouvant aux pages 5 et 38 dont il avait refusé la communication en vertu des alinéas 21(1)a) et 21(1)b) lorsqu’il a répondu à la demande d’accès. L’OTC continue de refuser la communication du reste des renseignements en vertu des exceptions énumérées ci-dessus.
Alinéa 20(1)b) : renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels de tiers
[5] L’alinéa 20(1)b) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques confidentiels fournis à une institution fédérale par un tiers (c’est-à-dire une entreprise privée ou une personne, et non pas le demandeur d’accès).
[6] Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements sont financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques;
- les renseignements sont de nature confidentielle;
- le tiers a fourni les renseignements à une institution fédérale;
- le tiers a toujours traité les renseignements comme étant confidentiels.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[7] Les renseignements de tiers en cause, dont l’OTC a refusé la communication parallèlement en vertu des alinéas 20(1)b), 20(1)c) et 20(1)d), consistent en :
- une partie d’un courriel relatif au dossier no 17-05835, aux pages 1, 17 et 21;
- le corps d’un courriel d’Air Transat à l’OTC relativement au dossier no 17-05835, aux pages 13 et 16.
[8] Air Transat et l’OTC ont eu la possibilité de démontrer que les renseignements satisfont aux critères de l’alinéa 20(1)b). Air Transat était particulièrement en désaccord avec la communication du montant précis du paiement figurant aux pages 1, 17 et 21 et d’une expression aux pages 13 et 16. L’OTC a refusé de présenter des observations concernant son application des exceptions aux renseignements de tiers et a indiqué qu’il était disposé à communiquer le montant du chèque.
[9] Je conviens que la communication des renseignements en cause équivaudrait à divulguer des renseignements fournis par Air Transat. Selon les observations d’Air Transat, je suis également d’avis que le tiers a toujours traité les renseignements comme étant confidentiels. Par conséquent, la majeure partie des renseignements satisfont au troisième et au quatrième critères de l’exception.
[10] Le premier critère de l’alinéa 20(1)b) est que les renseignements doivent être de nature financière, commerciale, scientifique ou technique. Bien que je convienne que le montant du chèque est un renseignement financier, ni Air Transat ni l’OTC n’ont établi en quoi les autres renseignements correspondent aux définitions courantes de ces termes.
[11] Dans la décision Merck Frosst Canada Ltée c. Canada (Santé) , 2012 CSC 3, la Cour suprême du Canada a déclaré qu’il convient de donner aux termes « financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques » leur sens lexicographique ordinaire. Selon les dictionnaires, le mot « commercial » signifie « relatif au commerce » ou « conçu, exécuté dans une intention lucrative ». Les renseignements en cause semblent être liés au paiement d’une sanction et d’une indemnisation des passagers. Aucun de ces renseignements ne semble concerner le commerce.
[12] Je ne suis pas convaincue par l’affirmation d’Air Transat selon laquelle les renseignements sont commerciaux seulement parce qu’ils se rapportent à un vol commercial ou parce qu’ils touchent l’exercice ou la gestion de ses activités. Dans l’affaire Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Bureau d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports) , 2006 CAF 157, au para 69, la Cour d’appel fédérale a rejeté une telle large interprétation du mot « commercial » lorsqu’il est appliqué à des renseignements :
[…] le mot « commercial », appliqué à un renseignement, intéresse en soi le commerce. Il ne s’ensuit pas que, du seul fait que les activités de NAV CANADA consistent à fournir, contre rémunération, des services de navigation aérienne, les renseignements recueillis durant un vol peuvent être qualifiés de « commerciaux ».
[13] Je conclus que seul le montant du paiement satisfait au premier critère de l’exception.
[14] Le deuxième critère de l’alinéa 20(1)b) exige que les renseignements soient confidentiels, selon une norme objective. Par conséquent, une partie qui affirme que les renseignements sont confidentiels en vertu de l’alinéa 20(1)b) doit établir que chacune des conditions suivantes a été satisfaite :
- les renseignements ne peuvent être obtenus de sources auxquelles le public a autrement accès;
- les renseignements doivent avoir été transmis confidentiellement avec l’assurance raisonnable qu’ils ne seront pas divulgués;
- les renseignements doivent être communiqués, que ce soit parce que la loi l’exige ou autrement, dans le cadre d’une relation de confiance entre l’administration et la personne qui les fournit ou dans le cadre d’une relation qui n’est pas contraire à l’intérêt public, et la communication des renseignements confidentiels doit favoriser cette relation dans l’intérêt public. [Voir : Air Atonabee Ltd. (f.a.s. City Express) c. Canada (Ministre des Transports) , [1989] A.C.F. no 453.]
[15] La partie plaignante a fourni des éléments de preuve selon lesquels l’OTC avait déjà communiqué le montant versé par Air Transat concernant le dossier numéro 17-05835. La preuve démontre qu’une demande d’accès a été présentée à l’OTC en 2018 (demande d’accès A-2018-00065) et que le document, tel qu’il a été communiqué, montre le montant du paiement versé par « Air Transat A.T. Inc. » relativement à « NOV# 17-05835 ». L’OTC n’a pas nié avoir communiqué ces renseignements et a indiqué qu’il y a eu un consentement à ce qu’ils soient communiqués. Air Transat, pour sa part, a indiqué qu’elle ne pouvait pas valider de manière indépendante les renseignements qui ont été communiqués. Air Transat a indiqué n’avoir jamais été consultée au sujet de la communication du montant versé dans le cadre d’une demande d’accès distincte et qu’elle n’y a pas consenti. Air Transat soutenait que la communication du montant versé dans le cadre d’une demande d’accès distincte [traduction] « n’en fait pas nécessairement un renseignement public et n’annule pas le droit de confidentialité d’Air Transat à l’égard de cette information. »
[16] Ni Air Transat ni l’OTC n’ont soutenu, encore moins fourni d’élément de preuve à cet effet, que la portion de la sanction versée au receveur général avait été communiquée par inadvertance dans le cadre de la demande d’accès A-2018-00065. Bien que la Cour fédérale ait reconnu que la communication par inadvertance ne diminue pas la nature confidentielle de renseignements qui sont autrement objectivement confidentiels, les circonstances de la plainte en l’espèce diffèrent de celles dans cette jurisprudence. En l’espèce, aucun élément de preuve ne démontre que la communication précédente a été faite par inadvertance. Les circonstances de la sanction et les conditions de paiement sont déjà généralement dans le domaine public, y compris les conditions pécuniaires de la sanction.
[17] Je suis d’avis que le montant du chèque est public du simple fait qu’il a été communiqué dans le cadre d’une demande d’accès.
[18] Dans la réponse faisant l’objet de la plainte, l’OTC a communiqué certains détails relatifs à la conformité d’Air Transat à l’avis de violation. Du fait même de sa communication ailleurs dans la réponse, ce renseignement est accessible au public.
[19] Je suis d’avis que le fait que l’OTC a reçu un paiement et que le montant de celui-ci (pages 1, 17 et 21) ne sont pas objectivement confidentiels.
[20] Pour que les renseignements soient confidentiels selon une norme objective, ils doivent avoir été transmis confidentiellement avec l’assurance raisonnable qu’ils ne seront pas divulgués. La question de savoir s’il y a une assurance raisonnable de confidentialité dépend des faits, notamment la teneur et le but des renseignements ainsi que la manière dont ils en sont venus à relever de l’institution fédérale.
[21] Les renseignements dont la communication a été refusée aux pages 13 et 16 se rapportent à la conformité d’Air Transat aux critères établis par l’OTC dans un avis de violation. Je suis d’avis qu’Air Transat ne peut pas raisonnablement s’attendre à ce que des renseignements généraux concernant sa conformité à l’avis de l’OTC demeurent confidentiels. Ni Air Transat ni l’OTC n’ont fourni d’élément de preuve attestant qu’il y a une telle entente entre les parties. Un énoncé de confidentialité générique au bas du courriel d’Air Transat et le fait que celui-ci a été envoyé par le conseiller juridique d’Air Transat ne suffisent pas pour établir que les renseignements figurant aux pages 13 et 16 ont été transmis confidentiellement avec l’assurance raisonnable qu’ils ne seront pas divulgués.
[22] En ce qui concerne la troisième condition de confidentialité objective, je note que l’OTC est un tribunal quasi judiciaire et un organisme de réglementation, alors qu’Air Transat est assujettie à la surveillance de l’OTC. L’OTC a permis à Air Transat de réduire le montant versé en indemnisation aux passagers par rapport à la sanction pécuniaire qui lui a été imposée. Il semble s’agir d’un avantage facultatif accordé par l’OTC à Air Transat. Compte tenu de ces circonstances, je suis d’avis que le public a un intérêt légitime à comprendre comment Air Transat s’est conformée à l’avis de l’OTC, et que la confidentialité des renseignements ne favorise pas la relation entre l’OTC et Air Transat dans l’intérêt public. Air Transat soutient que la communication [traduction] « nuirait à l’échange privilégié entre l’OTC et Air Transat ainsi que d’autres transporteurs aériens. » Je ne suis pas convaincue que la communication pourrait vraisemblablement faire en sorte que des tiers ne se conformeraient pas aux avis de l’OTC ou ne profiteraient pas des avantages facultatifs accordés par ce dernier par peur que l’information devienne accessible au public. Je n’ai eu connaissance d’aucun élément de preuve selon lequel la relation est contraire à l’intérêt public.
[23] Compte tenu de ce qui précède, je conclus qu’aucun des renseignements ne satisfait aux conditions de confidentialité objective.
[24] Je conclus que l’information ne satisfait pas aux critères de l’alinéa 20(1)b).
Alinéa 20(1)c) : pertes ou profits financiers d’un tiers
[25] L’alinéa 20(1)c) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements dont la communication risquerait vraisemblablement d’avoir une incidence financière importante sur un tiers (c’est-à-dire une entreprise privée ou un particulier, et non pas le demandeur d’accès) ou de nuire à sa compétitivité.
[26] Pour invoquer cette exception relativement aux pertes ou profits financiers d’un tiers, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- la divulgation des renseignements pourrait causer des pertes ou profits financiers appréciables pour le tiers;
- il y a une attente raisonnable que ce préjudice puisse être causé; l’attente doit être bien au-delà d’une simple possibilité.
[27] Pour invoquer cette exception relativement à la compétitivité, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- la divulgation des renseignements pourrait nuire à la compétitivité du tiers;
- il y a une attente raisonnable que ce préjudice puisse être causé; l’attente doit être bien au-delà d’une simple possibilité.
[28] Lorsque ces critères sont satisfaits et que le tiers auquel les renseignements se rapportent consent à leur divulgation, le paragraphe 20(5) exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider si elles doivent communiquer ou non les renseignements.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[29] L’OTC a appliqué l’alinéa 20(1)c) en parallèle avec les alinéas 20(1)b) et 20(1)d) pour refuser de communiquer les renseignements susmentionnés se trouvant aux pages 1, 13, 16-17 et 21.
[30] Air Transat prétend que la communication révèlerait de l’information sensible à ses concurrents, comme l’indiquent ses observations initiales et subséquentes. Les observations d’Air Transat à ce sujet semblent être entièrement fondées sur des suppositions. Compte tenu de la nature des renseignements, il demeure difficile de voir en quoi la communication pourrait, par exemple, révéler de l’information sur les activités de lobbying d’Air Transat.
[31] Air Transat a affirmé que la communication du montant du chèque figurant aux pages 1, 17 et 21 pourrait avoir une incidence considérable sur les résultats de litiges.
[32] Suivant l’alinéa 20(1)c), il est nécessaire de fournir des éléments de preuve qui établissent l’incidence financière que la communication des renseignements pourrait avoir sur le tiers et sa compétitivité ainsi que la probabilité de cette incidence. Les parties doivent démontrer l’existence d’un lien clair et direct entre la communication de renseignements précis et un risque de préjudice bien au-delà de la simple possibilité [voir : Merck , supra , para 197, 206]. Les tribunaux ont indiqué qu’il est très difficile de démontrer que la divulgation de renseignements accessibles au public risque vraisemblablement de causer un préjudice (voir Merck, supra , au para 208).
[33] Air Transat n’a pas fourni d’observations suffisantes pour établir si la communication causerait un préjudice important à Air Transat ou à sa compétitivité. Bien qu’Air Transat ait indiqué qu’il y a un lien direct entre la communication et le préjudice allégué, la communication semblerait seulement révéler des renseignements qui sont déjà dans le domaine public. En outre, bien qu’Air Transat ait affirmé que la répartition exacte de la sanction aurait une incidence sur des litiges, elle n’a pas expliqué la nature de cette incidence ni la probabilité qu’elle se produise. Je ne suis pas convaincue que la communication de ces faits dans ce contexte puisse vraisemblablement causer les préjudices allégués par Air Transat.
[34] Je conclus que l’information ne satisfait pas aux critères de l’alinéa 20(1)c).
Alinéa 20(1)d) : négociations d’un tiers
[35] L’alinéa 20(1)d) exige que les institutions refusent de communiquer des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement d’entraver les négociations contractuelles ou autres d’un tiers (c’est-à-dire une entreprise privée ou un particulier, et non pas le demandeur d’accès).
[36] Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- un tiers mène ou mènera des négociations en vue de contrats ou à d’autres fins;
- la divulgation des renseignements pourrait nuire à ces négociations;
- il y a une attente raisonnable que ce préjudice puisse être causé; l’attente doit être bien au-delà d’une simple possibilité.
[37] Lorsque ces critères sont satisfaits et que le tiers auquel les renseignements se rapportent consent à leur divulgation, le paragraphe 20(5) exige que les institutions exercent raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider si elles doivent communiquer ou non les renseignements.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[38] L’OTC a appliqué l’alinéa 20(1)d) en parallèle avec les alinéas 20(1)b) et 20(1)c) pour refuser de communiquer les renseignements susmentionnés se trouvant aux pages 1, 13, 16-17 et 21.
[39] Les tribunaux ont interprété l’entrave, dans le contexte de l’alinéa 20(1)d), comme signifiant « obstruction », tout comme le terme correspondant dans la version anglaise, « interference ». [voir Blood Band c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien) , 2003 CF 1397, para 49; Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre des Affaires extérieures), [1990] 3 F.C. 665 (F.C.T.D.), para 24-25]. 665, (R.D.C.F.) paras 24-25).
[40] Air Transat affirme que la communication entravera des « négociations financières » avec l’OTC d’autres organismes de réglementation. Les renseignements en cause en l’espèce se rapportent à la conformité d’Air Transat à l’avis de l’OTC et au paiement de la sanction qui y est indiquée. Aucun des renseignements en cause ne se rapporte à des négociations. Air Transat n’a pas fourni suffisamment de détails pour me permettre de voir un lien avec des négociations en cours ou prévues avec l’OTC ou tout autre organisme de réglementation sur lesquelles la communication aurait une incidence. En outre, le fait que le montant soit accessible au public semble indiquer que le lien entre la communication et le préjudice n’est pas clair et direct (voir Merck, supra , au para 208).
[41] Je conclus que les renseignements ne satisfont pas aux critères de l’alinéa 20(1)d).
Article 23 : secret professionnel de l’avocat et privilège relatif à un litige
[42] L’article 23 permet aux institutions de refuser de communiquer des renseignements protégés par le secret professionnel de l’avocat ou du notaire lorsque l’information concerne des avis juridiques donnés à un client. L’article 23 permet aussi aux institutions de refuser de communiquer des renseignements protégés par le privilège relatif au litige lorsque l’information a été préparée ou recueillie aux fins d’un litige.
[43] Pour invoquer cette exception relativement au secret professionnel de l’avocat, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- l’information consiste en une communication entre un avocat ou un notaire et son client;
- cette communication concerne directement les consultations ou les avis juridiques, y compris tous les renseignements nécessaires échangés en vue de l’obtention d’avis juridiques;
- les communications et les conseils sont destinés à être confidentiels.
[44] Pour invoquer cette exception relativement à un litige, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements ont été préparés ou recueillis dans le but principal d’un litige;
- le litige est en cours ou peut être raisonnablement appréhendé.
[45] Le privilège relatif au litige prend fin généralement lorsque le litige est terminé, sauf lorsqu’un litige connexe est en instance ou est raisonnablement appréhendé.
[46] Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions (à qui appartient le privilège) doivent alors exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements.
L’information satisfait-elle aux critères de l’exception?
[47] L’OTC a appliqué l’article 23 à une importante quantité de renseignements, et, dans de nombreux cas, parallèlement aux alinéas 21(1)a) et 21(1)b). Air Transat a affirmé que l’article 23 s’applique également à ses renseignements, qui sont visés par le privilège relatif à un litige.
[48] Bien qu’Air Transat ait indiqué un litige pertinent, je suis d’avis qu’elle n’a pas étayé son affirmation selon laquelle les renseignements en question ont été préparés ou recueillis dans le but principal d’un litige. Les renseignements semblent plutôt avoir été préparés et recueillis dans le but de se conformer à l’avis de l’OTC. Air Transat affirme que les renseignements ont été préparés dans le but principal d’éviter un litige. Même si j’ai conclu que c’était le cas, je me permets de faire remarquer que cette exception vise à protéger les renseignements qui seront utilisés dans le cadre d’un litige et non les renseignements utilisés pour éviter un litige. Je ne suis pas d’avis qu’Air Transat a établi en quoi les renseignements le concernant, qui se trouvent aux pages 1, 13, 16-17 et 21, satisfont aux critères de l’article 23.
[49] J’ai invité l’OTC à présenter des observations pour expliquer en quoi les renseignements aux pages 1, 13, 16-17 et 21 satisfont aux critères de l’article 23, mais il a refusé de le faire. Par conséquent, je conclus que les renseignements aux pages 1, 13, 16-17 et 21 ne satisfont pas aux critères de l’article 23.
[50] Dans la plupart des cas où l’OTC a appliqué l’article 23, je conviens que les renseignements consistent en des communications entre l’OTC et ses avocats concernant directement l’obtention d’avis juridiques. Compte tenu de la nature des renseignements, des observations reçues et d’un examen des renseignements accessibles au public, je conclus que l’OTC destinait ces renseignements à être confidentiels.
[51] Concernant la correspondance qui se trouve aux pages 306-307, cependant, je ne suis pas convaincue que ces renseignements satisfont aux critères du secret professionnel de l’avocat. Il s’agit d’un échange entre les avocats de l’OTC et le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). L’OTC soutient que [traduction] « les communications entre les conseillers juridiques de l’Office et ceux du CRTC faisaient partie intégrante de la recherche effectuée par les conseillers juridiques de l’Office en vue de fournir des avis juridiques à ce dernier. » Cependant, l’OTC et le CRTC ont des représentants juridiques distincts plutôt que des conseillers juridiques communs du ministère de la Justice. Par conséquent, il est difficile de voir comment des avis juridiques pourraient être communiqués entre l’OTC et le CRTC sans violer le secret professionnel de l’avocat. L’explication de l’OTC n’indiquait pas comment les renseignements pouvaient demeurer secrets lorsqu’ils avaient été divulgués à l’extérieur du cadre de la relation entre un avocat et son client.
[52] Je conclus que les renseignements satisfont aux critères de l’article 23, à part ceux qui se trouvent aux pages 306-307.
[53] Dans les cas où les renseignements satisfont aux critères de l’article 23, je n’ai pas examiné les autres exceptions ayant été appliquées à ces mêmes renseignements par l’OTC.
L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?
[54] Puisque certains des renseignements satisfont aux critères de l’article 23, comme mentionné ci-dessus, l’OTC était tenu d’exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire afin de décider de communiquer ou non les renseignements. Pour ce faire, l’OTC devait prendre en considération tous les facteurs pertinents pour et contre la communication.
[55] La décision prise par une institution de ne pas communiquer l’information doit être transparente, intelligible et justifiée. L’explication de l’institution est suffisante lorsque cette dernière précise comment la décision a été prise et que les documents relatifs au processus décisionnel permettent de comprendre pourquoi l’institution a procédé comme elle l’a fait.
[56] Bien que l’OTC ait énuméré des facteurs qu’il a pris en considération lorsqu’il a décidé de refuser de communiquer les renseignements aux pages 306-307, il n’a pas fourni d’observation indiquant les facteurs qu’il a pris en considération lorsqu’il a décidé de ne pas communiquer des renseignements en vertu de l’article 23 à d’autres pages.
[57] Je dois donc conclure que l’OTC n’a pas démontré qu’il a raisonnablement exercé son pouvoir discrétionnaire.
Alinéa 21(1)b) : comptes rendus de consultations ou de délibérations
[58] L’alinéa 21(1)b) permet aux institutions de refuser de communiquer des comptes rendus de consultations ou de délibérations auxquelles ont participé des employés du gouvernement, des ministres ou leur personnel.
[59] Pour que cette exception s’applique, les documents qui contiennent les renseignements doivent avoir été créés moins de vingt ans avant la demande d’accès.
[60] Pour invoquer cette exception, les institutions doivent démontrer ce qui suit :
- les renseignements sont un compte rendu, c’est-à-dire un rapport ou une description;
- le compte rendu concerne des consultations ou des délibérations;
- au moins un dirigeant, administrateur ou employé de l’institution ou un ministre ou un membre de son personnel a pris part aux consultations ou aux délibérations.
[61] Lorsque ces critères sont satisfaits, les institutions doivent alors exercer raisonnablement leur pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements.
[62] Toutefois, le paragraphe 21(2) interdit expressément aux institutions d’invoquer l’alinéa 21(1)b) pour refuser de communiquer ce qui suit :
- des documents qui contiennent les motifs ou les comptes rendus de décisions qui touchent les droits d’une personne prises par les institutions dans l’exercice de leurs pouvoirs discrétionnaires ou dans l’exercice de leurs fonctions judiciaires ou quasi judiciaires;
- des rapports établis par des consultants ou des conseillers qui n’étaient pas, au moment où ces rapports ont été établis, des administrateurs, des dirigeants ou des employés d’une institution ou des membres du personnel du ministre.
L’information satisfait-elle aux critères des exceptions?
[63] La plupart des renseignements dont la communication a été refusée en vertu de l’alinéa 21(1)b) sont en dehors de la portée de la plainte, ont déjà été communiqués ou sont aussi visés par l’article 23, selon mes conclusions. Le refus de communiquer les seuls renseignements qu’il reste à analyser à la page 10 des documents était exclusivement en vertu de l’alinéa 21(1)b).
[64] Je conviens que les renseignements dont la communication a été refusée à la page 10 sont un compte rendu d’une consultation interne, qu’ils ont été créés moins de vingt ans avant la demande d’accès et que plusieurs employés de l’OTC y prenaient part.
[65] Par conséquent, je conclus que les renseignements en cause satisfont aux critères de l’alinéa 21(1)b).
L’institution a-t-elle exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire quant à sa décision de communiquer ou non l’information?
[66] Étant donné que les renseignements satisfont aux critères de l’alinéa 21(1)b), l’OTC était tenu d’exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements. Pour ce faire, l’OTC devait prendre en considération tous les facteurs pertinents pour et contre la communication.
[67] L’OTC n’a fourni aucune observation indiquant les facteurs qu’il a pris en considération lorsqu’il a décidé de ne pas communiquer les renseignements en vertu de l’alinéa 21(1)b).
[68] Je dois donc conclure que l’OTC n’a pas démontré qu’il a raisonnablement exercé son pouvoir discrétionnaire.
Résultat
[69] La plainte est fondée.
Ordonnance
J’ordre à la présidente de l’Office des transports du Canada ce qui suit :
- Communiquer tous les renseignements non divulgués en vertu des alinéas 20(1)b) ou 20(1)c) qui se trouvent aux pages 1, 13, 16-17 et 21;
- Communiquer tous les renseignements dont la communication a été refusée en vertu de l’article 23 qui se trouvent aux pages 306-307;
- Exercer de nouveau son pouvoir discrétionnaire pour décider de communiquer ou non les renseignements auxquels l’OTC a appliqué l’alinéa 21(1)a), l’alinéa 21(1)b) et l’article 23, en prenant en considération tous les facteurs pertinents pour et contre la communication.
Rapport et avis de l’institution
Le 13 mars 2025, j’ai transmis à la présidente de l’Office des transports du Canada mon rapport dans lequel je présentais mon ordonnance.
Le 31 mars 2025, la coordonnatrice de l’AIPRP, Direction des services du registraire et du secrétariat de l’OTC, m’a avisée que ce dernier donnerait suite à l’ordonnance. L’OTC a indiqué qu’il communiquerait les renseignements qui se trouvent aux pages 1, 13, 16-17, 21, 306-307. Il a également fourni des détails concernant le nouvel exercice de son pouvoir discrétionnaire, lors duquel il a pris en considération plusieurs facteurs pertinents, dont le contexte, la sensibilité des renseignements, l’intérêt public et le but des exceptions.
Révision devant la Cour fédérale
Lorsqu’une allégation dans une plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a), b), c), d), d.1) ou e) de la Loi , la partie plaignante a le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. Lorsque la Commissaire à l’information rend une ordonnance, l’institution a également le droit d’exercer un recours en révision. La partie plaignante et/ou l’institution doivent exercer un recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables suivant la date du présent compte rendu. Si celles-ci n’exercent pas de recours, les tiers peuvent exercer un recours en révision dans les 10 jours ouvrables qui suivent. Quiconque exerce un recours en révision doit signifier une copie de sa demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43. Si personne n’exerce de recours en révision dans ces délais, toute ordonnance rendue prend effet le 46e jour ouvrable suivant la date du présent compte rendu.
Autres destinataires du compte rendu
Conformément au paragraphe 37(2), le présent compte rendu a été envoyé à Air Transat.