Défense nationale (Re), 2023 CI 27

Date : 2023-09-28
Numéros de dossier du Commissariat : 5822-02031, 5822-02032, 5822-02033 et 5822-02034
Numéros de dossier de l’institution : A-2021-01998, A-2021-02001, A-2021-02003 et A-2021-02004

Sommaire

La partie plaignante allègue que la Défense nationale n’a pas effectué une recherche raisonnable en réponse à des demandes d’accès en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, qui visaient à obtenir des documents liés à certains contrats. Les plaintes s’inscrivent dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.

Les enquêtes ont permis de conclure que la Défense nationale n’a pas tenté de récupérer les documents qui étaient en la possession du tiers et qu’elle était en droit d’obtenir dans le cadre du contrat. Par suite des enquêtes, la Défense nationale a communiqué avec l’entrepreneur pour demander des copies des documents et a récupéré ceux-ci.

La Commissaire à l’information a ordonné à la Défense nationale de traiter tous les documents supplémentaires localisés, et de fournir de nouvelles réponses à la partie plaignante, dans lesquelles sont communiqués les documents supplémentaires ou sont indiqués les raisons pour lesquelles les documents supplémentaires ne répondent pas aux demandes.

La Défense nationale a avisé la Commissaire à l’information qu’elle donnerait suite aux ordonnances.

Les plaintes sont fondées.

Plainte

[1]     La partie plaignante allègue que le ministère de la Défense nationale (MDN) n’a pas effectué une recherche raisonnable en réponse à des demandes d’accès en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, qui visaient à obtenir des documents liés aux contrats W6369-21-X008 et W6369-19-X033/A. Les plaintes s’inscrivent dans le cadre de l’alinéa 30(1)a) de la Loi.

Enquête

[2]     Le MDN est tenu d’effectuer une recherche raisonnable pour les documents visés par les demandes d’accès, c’est-à-dire qu’un ou des employés expérimentés de l’institution ayant une connaissance du sujet de la demande d’accès doivent avoir fait des efforts raisonnables pour repérer et localiser tous les documents raisonnablement liés à la demande.

[3]     Une recherche raisonnable correspond au niveau d’effort attendu de toute personne sensée et juste à qui l’on demande de chercher les documents pertinents à l’endroit où ils sont susceptibles d’être conservés.

[4]     Il n’est pas nécessaire que cette recherche soit parfaite. Une institution n’est donc pas tenue de prouver hors de tout doute qu’il n’existe pas d’autres documents. Les institutions doivent toutefois être en mesure de démontrer qu’elles ont fait des démarches raisonnables pour repérer et localiser les documents pertinents.

[5]     La Loi prévoit un droit d’accès aux documents relevant des institutions fédérales. Bien que la Loi ne définisse pas le terme « relever de », la Cour suprême du Canada a affirmé que ce terme devrait être interprété de façon libérale et généreuse pour assurer un droit d’accès efficace. [Voir Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Ministre de la Défense nationale), 2011 CSC 25 (Agenda du premier ministre).]    

[6]     Bien qu’initialement, le MDN soutenait que les documents en cause ne relevaient pas de lui, il a depuis convenu qu’ils relevaient de lui. Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’examiner la question plus à fond.

L’institution a-t-elle effectué une recherche raisonnable de documents?

[7]     Au cours des enquêtes, le Commissariat à l’information a communiqué avec la partie plaignante pour tenter d’obtenir une preuve qui corrobore l’allégation selon laquelle les recherches qu’a effectuées le MDN sont déraisonnables. La partie plaignante a répondu que les documents demandés étaient des livrables dans le cadre des contrats W6369-21-X008 et W6369-19-X033/A, et que le MDN aurait donc dû les avoir en sa possession.

[8]     Par ailleurs, le Commissariat a demandé au MDN de fournir des détails concernant ses recherches de documents répondant aux demandes. Le MDN a fourni des renseignements indiquant que des efforts importants ont été déployés pour récupérer des documents sur un ordinateur portable utilisé par un expert en la matière pour travailler sur les documents demandés. L’ordinateur portable a subi une panne catastrophique et a été retourné au service d’assistance de Services partagés Canada. Lorsqu’un ordinateur portable est retourné, la procédure habituelle est de restaurer l’image système, et aucune donnée n’était récupérable. Tous les renseignements enregistrés directement sur l’appareil seraient perdus. L’expert en la matière aurait cependant dû conserver un accès aux renseignements enregistrés sur le lecteur Q ou sur les serveurs de courriel.

[9]     Après avoir examiné le libellé des contrats W6369-19-X033/A et W6369-21-X008, je note que l’entrepreneur aurait dû fournir au MDN une version papier et une version électronique des rapports d’étape au quart, à la moitié et aux trois quarts du projet.

[10]     Lorsqu’une institution reçoit une demande d’accès, l’une des premières choses qu’une institution doit faire est de récupérer les documents répondant à une demande d’accès. Les enquêtes ont révélé que le MDN n’a pas tenté de récupérer les documents répondant à la demande auprès de l’entrepreneur. Elles ont également révélé que le MDN n’avait pas effectué de recherche de documents papier et qu’il n’avait pas tenté de récupérer les documents sur la plateforme infonuagique. Malgré la preuve selon laquelle les documents papier devraient exister, le bureau de première responsabilité, le SMA(AP), a déclaré qu’il n’y avait pas de documents papier parmi lesquels effectuer une recherche. Le tout illustre les répercussions que peuvent avoir les lacunes au chapitre de la gestion des documents et leur effet sur le droit d’accès.

[11]     Par suite des enquêtes du Commissariat, le 27 mars 2023, le MDN a finalement communiqué avec l’entrepreneur et demandé des copies des documents pertinents. De plus, le SMA(AP) a depuis récupéré les documents sur la plateforme infonuagique, et a indiqué qu’il était en train de les examiner et de les transférer à la Direction de l’accès à l’information et à la protection des renseignements personnels.

[12]     Compte tenu de ce qui précède, je conclus que le MDN n’a pas effectué de recherche raisonnable, car il n’a pas tenté de récupérer les documents relevant de lui auprès de l’entrepreneur, ni tenté de récupérer les documents sur la plateforme infonuagique.

Résultat

[13]     Les plaintes sont fondées.

Ordonnances

Conformément au paragraphe 36.1(1) de la Loi, j’ordonne au ministre de la Défense nationale ce qui suit :

  1. Traiter tous les documents supplémentaires localisés à la suite des recherches supplémentaires;
  2. Fournir de nouvelles réponses à la partie plaignante une fois le traitement terminé;
  3. Communiquer à la partie plaignante les documents répondant à la demande, à moins que leur communication puisse être refusée, en tout ou en partie, en vertu d’une ou de plusieurs dispositions de la partie I de la Loi. Le cas échéant, nommer la ou les dispositions invoquée(s);
  4. S’il n’y a aucun document supplémentaire relatif à la demande, l’indiquer dans la réponse.

Le ministre doit se conformer aux dispositions du paragraphe 37(4) lorsqu’il communique des documents en réponse à mes ordonnances.

Le 25 août 2023, j’ai transmis au ministre de la Défense nationale mon rapport dans lequel je présentais mes ordonnances.

Le 21 septembre 2023, la chef des opérations de la Direction de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels m’a avisée que le MDN donnerait suite à mon ordonnance.

Lorsque la plainte s’inscrit dans le cadre de l’alinéa 30(1)a), b), c), d), d.1) ou e) de la Loi, la partie plaignante et l’institution ont le droit d’exercer un recours en révision devant la Cour fédérale. Celles-ci doivent exercer leur recours en révision dans un délai de 35 jours ouvrables après la date du compte rendu et doivent signifier une copie de leur demande de révision aux parties intéressées, conformément à l’article 43. Si personne n’exerce de recours en révision dans ces délais, l’ordonnance prend effet le 36e jour ouvrable suivant la date du présent compte rendu.

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