Article 14 - Affaires fédéro-provinciales

Archivé [2008-11] – Guide des enquêteurs pour l’interprétation de la Loi sur l’accès à l’information

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Nous vous invitons à consulter la section Documents d’orientation de la Commissaire à l’information où vous trouverez de l’information à jour concernant la façon dont nous enquêtons et nous interprétons la Loi sur l'accès à l'information

De plus, la Commissaire à l'information publie sur le site Web des comptes rendus de ses enquêtes pour guider les institutions et les parties plaignantes. En utilisant la base de données, vous pouvez trier les décisions en fonction des articles pertinents de la Loi.

Disposition 

  • 14     Le responsable d'une institution fédérale peut refuser la communication de documents contenant des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de porter préjudicie à la conduite par le gouvernement du Canada desaffaires fédéro-provinciales , notamment des renseignements sur :
    • a) des consultations  ou délibérations fédéro-provinciales ; ou
    • b) les orientations  ou mesures adoptées ou à adopter par le gouvernement du Canada touchant la conduite des affaires fédéro-provinciales.

Observations préliminaires 

La Loi sur l'accès à l'information, L.R.C. 1985, ch. A-1 (la Loi), prévoit que les citoyens canadiens et les résidents permanents au sens de la Loi sur l'immigration ainsi que toute personne ou société présente au Canada ont droit d'avoir accès à la plupart des documents relevant du gouvernement fédéral. Plus précisément, la Loi prévoit que sont accessibles tous les renseignements contenus dans les documents relevant des institutions fédérales énumérées à l'annexe I, à moins qu'une disposition expresse de la Loi ne permette ou ne prescrive aux responsables des institutions de refuser la communication ou que les dossiers ou une partie de ceux-ci ne soient exclus sous le régime des articles 68 ou 69.

L'article 14 est une exception discrétionnaire fondée sur un critère subjectif visant une catégorie particulière de documents. C'est également l'une des rares exceptions (avec celles qui sont prévues à l'article 15 ainsi qu'aux alinéas 16(1)c) ou d) et 18d)) qui peut être soumise, en application de l'article 50 à une révision judiciaire différente de celle qui est prévue à l'article 49 pour le reste des exceptions. Cette particularité, toutefois, n'entraîne pas de différence quant aux pouvoirs d'ordonnance de la Cour. En effet, celle-ci peut, tant sous le régime de l'article 49 que sous celui de l'article 50, ordonner qu'il soit ou non donné accès aux documents. La différence réside dans le critère appliqué, c'est-à-dire dans le degré de conviction auquel la Cour doit parvenir.

Essentiellement, l'article 50 prévoit que lorsque le responsable d'institution a des motifs raisonnables de croire qu'un document ou une partie d'un document renferme des renseignements appartenant à la catégorie visée par l'exception, il peut alors exercer son pouvoir discrétionnaire et déterminer s'il convient d'en donner communication.

Malgré la norme plus élevée visant l'intervention du tribunal relativement à la décision d'un responsable prévue à l'article 50, il revient certainement au commissariat de déterminer le caractère raisonnable de la conclusion du responsable selon laquelle la communication causerait le préjudice énoncé dans les exceptions sous réserve d'un contrôle judiciaire visé par l'article 50. L'affaire Ruby c. Canada (Solliciteur général, GRC), [2000] A.C.F. no 779, 8 juin 2000, concernait l'alinéa 22(1)b) de la Loi sur la protection des renseignements personnels (l'équivalent de l'alinéa 16(1)c) de la Loi sur l'accès à l'information), lequel est susceptible de contrôle en vertu de l'article 49 de la Loi sur la protection des renseignements personnels (article 50 de la Loi sur l'accès à l'information). Dans l'affaire Ruby, la Cour d'appel fédérale a infirmé la conclusion du juge de première instance selon laquelle il ne pouvait substituer son opinion sur le préjudice à la décision du responsable de l'institution, ordonnant plutôt de procéder à un examen plus approfondi du caractère raisonnable de la décision de l'institution selon laquelle le préjudice décrit dans l'exception serait causé par la communication :

En outre, le juge qui a effectué l'examen a conclu, à la page 41 de sa décision, que « la Cour ne peut substituer son opinion à celle du SCRS ou à celle du Solliciteur général au sujet de l'évaluation du risque vraisemblable de préjudice probable ». Toutefois, nous aimerions ajouter qu'en vertu de l'article 49 [article 50 de la Loi sur l'accès à l'information], il incombe notamment à la Cour de déterminer le caractère raisonnable des motifs pour lesquels le SCRS a refusé la communication. Cela étant, le juge qui a effectué l'examen aurait dû, à notre avis, examiner de plus près la question de savoir si la divulgation de renseignements et en particulier de renseignements remontant à plus de 20 ans risquait vraisemblablement de nuire aux efforts précis destinés à faire respecter les lois et à permettre la détection d'activités hostiles et, par conséquent, s'il existait un motif raisonnable justifiant le refus de communication de la part du SCRS. (italiques ajoutés)

Critère 

1) Préambule :

Cette exception reconnaît qu'il peut être nécessaire de protéger le rôle du gouvernement dans les affaires nationales. Elle vise à habiliter le responsable d'institution à refuser de communiquer des documents «... contenant des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement ...» de porter préjudice aux relations fédéro-provinciales.

La catégorie de documents est bien définie; il s'agit des documents qui renferment des renseignements concernant le rôle du gouvernement dans la conduite d'activités fédéro-provinciales. Les exemples énoncés dans la disposition décrivent les deux types de situations où la communication pourrait, selon le Parlement, être nuisible, sans que ce soit nécessairement le cas. Il ne s'agit pasd'une exception obligatoire.

Encore une fois, l'article prévoit une exception discrétionnaire fondée sur un critère subjectif. Son application suppose donc un processus en deux étapes :

  • Premièrement, on procède à l'examen des documents pour déterminer s'ils renferment des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite par le gouvernement des affaires fédéro-provinciales ou à son rôle dans ces affaires.

À NOTER : La conclusion de l'institution relative au risque vraisemblable de préjudice probable n'a pas besoin d'être absolue. Le responsable d'institution n'a pas à établir selon la prépondérance des probabilités qu'il y aura probablement préjudice. Il suffit d'avoir des motifs raisonnables de croire que la divulgation des renseignements causerait préjudice. Autrement dit, il ne s'agit pas de déterminer si le responsable a raison de croire au risque vraisemblable de préjudice, mais bien si un tribunal reconnaîtrait qu'existaient des motifs raisonnables de tirer une telle conclusion, c'est-à-dire qu'une personne raisonnable aurait pu parvenir à la même conclusion. Il faut se demander si une personne moyenne aurait pu parvenir à cette conclusion (et non si elle y serait parvenue). En raisonnant à l'inverse, on peut dire que le responsable ne sera dans l'erreur que lorsqu'il peut être établi que sa conclusion ne reposait pas sur des motifs raisonnables

  • Deuxièmement, il s'agit de mettre en balance l'intérêt public que présente la communication de ce type de renseignements et le préjudice probable, et de déterminer s'il convient d'exercer le pouvoir discrétionnaire d'appliquer l'exception.

Ces deux étapes diffèrent, mais les deux doivent être documentées. Le ministère doit être en mesure, chaque fois qu'il veut justifier un refus de communication, de prouver le préjudice probable et d'établir pourquoi il existe une probabilité raisonnable que ce préjudice se produise. Il doit, en même temps, indiquer les facteurs que le responsable d'institution a pris en considération pour refuser de divulguer l'information.

Lors de l'examen de la demande d'une exception discrétionnaire comme celle visée par l'article 14, il importe de se rappeler qu'il incombe à l'institution fédérale de prouver non seulement que les renseignements sont visés par l'exception, mais que le responsable de l'institution ou son délégué a exercé de façon régulière son pouvoir discrétionnaire en décidant de ne pas communiquer les renseignements 1 . S'il n'y a aucune preuve que le responsable de l'institution a examiné la question de communiquer ou non des renseignements visés par une exception discrétionnaire ou si la preuve de la raison pour laquelle il a décidé de refuser la communication indique qu'il s'est fondé sur des facteurs non pertinents ou déraisonnables ou des considérations irrégulières, ou que la décision n'est pas conforme aux objets de la Loi (élargir l'accès aux renseignements fédéraux sous réserve d'exceptions limitées et précises), le commissariat, et la Cour fédérale dans le cadre d'un contrôle, peut contester ou rejeter la décision de refuser la communication.

2) Conditions :

Pour bien juger de l'applicabilité de l'exception, il faut déterminer si les documents contiennent «... des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de porter préjudice à la conduite par le gouvernement du Canada des affaires fédéro-provinciales ...». À l'heure actuelle, la Cour fédérale du Canada n'a rendu qu'une décision sur les conditions préalables à l'application de la disposition. Toutefois, la jurisprudence élaborée par d'autres tribunaux pourrait être appliquée, par analogie, à la Loi fédérale. Les paragraphes suivants résument l'interprétation donnée à cet article par le commissariat.

Puisqu'il s'agit d'une exception fondée sur le préjudice, deux critères s'appliquent en réalité. Il faut d'abord satisfaire au critère du risque vraisemblable de préjudice applicable à toutes les exceptions fondées sur le caractère préjudiciable ainsi qu'à sa modulation dans le contexte des affaires fédéro-provinciales. Il faut ensuite établir si le risque vraisemblable de préjudice constitue une menace pour la conduite par le gouvernement du Canada des affaires fédéro-provinciales.

a) Risque vraisemblable de préjudice :

La Cour fédérale a peu statué sur l'interprétation à donner à cette partie de la disposition, mais elle s'est prononcée sur le volet relatif au préjudice du critère à établir sous le régime des alinéas 20(1)c) et d). Or, ces alinéas sont formulés de la même façon. Comme le législateur est censé respecter le principe de l'uniformité de la formulation, chaque mot d'une loi ne devrait avoir qu'une seule et même signification lorsqu'il est employé dans un contexte similaire. Par conséquent, la jurisprudence élaborée par la Cour fédérale relativement à l'article 20 peut s'appliquer également dans le contexte de la présente disposition.

Dans la décision Air Atonabee c. Canada (Ministre des Transports) (1989), 27 F.T.R. 194 (1re inst.), la Cour a jugé que la question à résoudre était celle de savoir si, en supposant que les renseignements soient utilisés, leur divulgation risquerait vraisemblablement de causer un préjudice probable. C'est à la partie qui s'oppose à la communication qu'il appartient de prouver cet élément2, et pour pouvoir se prévaloir de l'exception, elle doit démontrer en quoi la divulgation serait préjudiciable ainsi que la gravité du préjudice craint.3

La preuve du préjudice doit être détaillée et convaincante, et elle doit indiquer la présence d'un lien direct entre la divulgation et le préjudice. Il faut toutefois établir une distinction claire entre le «lien direct», le critère à appliquer aux exceptions fondées sur un critère subjectif, et le «lien direct de cause à effet», que la Cour d'appel a expressément rejeté dans la décision Canada Packers Inc.. c. Canada (Ministre de l'Agriculture), [1989] 1 C.F. 47 (C.F.A.). Le «lien direct» suppose un lien causal direct : la personne qui s'oppose à la divulgation doit prouver au moyen d'éléments précis l'existence d'un lien entre la divulgation et la possibilité de préjudice. Autrement dit, il doit exister une explication logique montrant pourquoi la divulgation pourrait occasionner un préjudice particulier. Il n'est pas nécessaire, cependant, d'établir un «lien direct de cause à effet» (c'est-à-dire de prouver que la divulgation causerait d'elle-même le préjudice particulier). En d'autres termes, il n'est pas nécessaire de prouver que la divulgation pourrait être la cause directe du préjudice.

Dans Commissaire à l'information c. Commission de l'immigration et du statut de réfugié, (1997), 140 F.T.R. 140, la Section de première instance de la Cour fédérale a caractérisé le critère de préjudice inscrit à l'alinéa 16(1)c) de la Loi comme une « croyance sûre », dans les termes suivants :

[TRADUCTION] Le risque vraisemblable de préjudice probable implique une croyance sûre. Il doit y exister un lien clair et direct entre la divulgation de renseignements particuliers et le préjudice invoqué. Il faut expliquer au tribunal en quoi et pourquoi la communication de ces renseignements occasionnerait le préjudice. Plus précise et documentée est la preuve, plus la nécessité de la confidentialité peut être établie. La preuve ne peut se limiter à une simple allusion générale à des enquêtes futures.

Le degré de preuve requis pour établir l'applicabilité d'une exception fondée sur le préjudice d'ordre économique ou sur les entraves aux négociations en vue de contrats4 est très élevé. Il faut, pour prouver le préjudice, retracer, expliquer et démontrer comment la divulgation de renseignements donnés pourra entraîner le préjudice invoqué.

Le critère prévu par la Loi à l'accès est celui du risque vraisemblable de pertes financières ou de préjudice à la compétitivité, sans égard au caractère intrinsèquement confidentiel ou non des renseignements divulgués. Lorsque les renseignements sont effectivement confidentiels, toutefois, la probabilité que les exigences de la Loi soient remplies peut s'en trouver accrue. La norme de preuve applicable au préjudice substantiel à la compétitivité est la preuve d'un tort appréciable. La preuve de la simple possibilité de préjudice relève de la pure hypothèse et ne saurait suffire. Cependant, si le risque de préjudice doit être probable, il n'est pas nécessaire qu'il soit certain.5

La seule description du préjudice possible, même détaillée, est souvent insuffisante. Il faut, au minimum, lier clairement la divulgation de renseignements particuliers au préjudice invoqué. Il faut expliquer en quoi et pourquoi la communication de ces renseignements occasionnerait le préjudice. Il ne sera pas nécessaire, toutefois, de donner beaucoup d'explications sur les résultats de la divulgation si les éléments suivants sont manifestes :

  • un préjudice sera causé;
  • la façon dont il sera causé (ainsi que le moment); et
  • les raisons pour lesquelles il sera causé.6

Ce que le commissariat doit obtenir, c'est une explication claire, logique et plausible sur le préjudice susceptible de survenir s'il y a divulgation et sur le lien existant entre la divulgation et le préjudice, c'est-à-dire le lien logique.

Lorsqu'il est nécessaire de raisonner par déduction ou lorsque la réponse à l'une quelconque de ces questions n'est pas claire, il faut préciser l'explication. Plus précise et documentée est la preuve, plus l'applicabilité de l'exception peut être établie. Mais plus la nature de la preuve est générale ou le résultat invraisemblable, plus il sera difficile de susciter la conviction qu'il existe un lien entre la communication de documents particuliers et le préjudice invoqué. Autrement dit, il sera difficile de conclure que les éléments du critère ont été établis.

Le contexte de la divulgation a également son importance. La jurisprudence a énoncé des conditions précises à prendre en considération pour déterminer si la divulgation risquera vraisemblablement d'occasionner un préjudice :

  • L'utilisation des renseignements : Dans cet examen, le commissariat doit présumer que les renseignements seront utilisés7. L'utilisation qu'un concurrent ferait probablement de l'information constitue, par exemple, un facteur pertinent. En quoi cette utilisation risquerait vraisemblablement d'entraîner un préjudice? À quel usage probable l'auteur de la demande destine-t-il les renseignements? Ce sont des facteurs pertinents pour déterminer comment l'utilisation des renseignements pourrait occasionner un préjudice donné.
  • La disponibilité des renseignements : Il est indiqué d'examiner si les renseignements que l'on souhaite tenir confidentiels peuvent déjà être obtenus d'autres sources accessibles au public ou s'il est possible qu'un membre du public puisse, en se livrant à ses propres observations et recherches, se les procurer.8 Lorsque les renseignements demandés sont déjà accessibles autrement au public, il n'est peut-être pas nécessaire de recourir à l'exception.9 La partie soutenant que les renseignements sont accessibles au public (même s'il s'agit du commissariat) assume le fardeau de prouver cette assertion. Non seulement faut-il prouver que les renseignements refusés sont autrement accessibles au public, mais encore, s'il s'agit de renseignements gouvernementaux, qu'ils ont été communiqués par des voies officielles.10
  • La couverture par la presse : La couverture par la presse d'un document confidentiel est un élément pertinent pour l'examen du risque vraisemblable de préjudice probable.11Lorsque des renseignements identiques ou similaires ont déjà été divulgués et que la presse en a traité, il n'y a pas lieu de craindre que la communication des renseignements demandés n'entraîne de préjudice supplémentaire. Il importe par ailleurs de signaler qu'un tiers ne peut faire valoir que les médias pourraient mal interpréter les renseignements demandés et lui causer préjudice. Cet argument a été jugé purement théorique.12
  • L'âge : La preuve de la période qui s'est écoulée entre la date du document confidentiel et celle de sa communication est pertinente.13 Parfois, plus le document est vieux, plus la probabilité de préjudice s'amenuise.
  • Autres documents pertinents : Chaque document doit être évalué individuellement, mais dans le contexte de l'ensemble des documents demandés, car la teneur totale de la communication peut influencer énormément les conséquences raisonnables de sa divulgation.14 D'un autre côté, un document pourrait occasionner un préjudice s'il était divulgué seul, alors que la communication pourrait n'entraîner aucun dommage si elle révélait la totalité du contexte et contenait une explication.

Ce sont les conséquences probables de la divulgation qui revêtent le plus d'importance dans l'évaluation de l'applicabilité de l'exception prévue par la présente disposition à la totalité ou à une partie d'un document, et non la nature du document ou celle des renseignements qu'il renferme.

b) Préjudice à la conduite par le gouvernement du Canada des affaires fédéro-provinciales :

Pour que l'exception s'applique, le document doit porter sur des négociations entre une province et l'État fédéral. Par conséquent, les négociations avec des tiers ne sont visées que dans la mesure où une province est touchée. La Loi d'interprétation définit ainsi le mot «province» : «Province du Canada ainsi que les territoires du Yukon, du Nord-Ouest et Nunavut».

Cette disposition ne vise que la protection de la conduite des affaires fédéro-provinciales dans l'exercice de fonctions gouvernementales. Pour qu'elle s'applique, il faut donc que les institutions fédérales et provinciales aient compétence pour accomplir de telles fonctions. Si l'une ou l'autre des institutions n'a pas cette compétence, l'exception est inapplicable. Elle l'est également, même si les institutions sont compétentes, lorsqu'elles accomplissaient des fonctions autres que des fonctions gouvernementales. Par exemple, ne seraient pas couverts des documents fournis par Revenu Canada à une province dans le cadre d'une relation perception acquittement.15

Jurisprudence

1) À l'échelon fédéral :

Canada (Commissaire à l'information) c. Canada (Premier ministre), [1993] 1 C.F. 427 (1re inst.). Selon la Cour, puisque les renseignements que le gouvernement voulait tenir confidentiels avaient été divulgués par d'autres sources, le risque que la communication de ces renseignements ou de renseignements similaires n'entraîne un préjudice s'en trouvait amoindri. Il était raisonnable de penser que le risque de préjudice lié à la communication, s'il existait, se serait manifesté à la suite de la divulgation faite par d'autres sources.

La Cour a jugé également que l'institution fédérale n'avait fait que des mentions générales concernant les documents demandés et que la preuve du lien entre le contenu de pages particulières et le risque vraisemblable de préjudice était tenue. Elle a déclaré, pour ces motifs, qu'elle n'était pas en mesure de conclure que le maintien de la confidentialité était justifié en l'espèce puisqu'aucun lien précis et compréhensible n'avait été démontré entre le préjudice invoqué et la communication.

2) Ontario :

(Ordonnances nos 87, 210, P-270, P-293, P-388, P-435 et P-630)

  • Un document énonçant le fait qu'une société entreprendrades négociations avec le gouvernement fédéral ne porte pas sur des relations intergouvernementales entre un province et le gouvernement fédéral. Aussi, la divulgation d'un document renfermant l'engagement, pris par la province, de négocier avec le gouvernement fédéral ne risque pas vraisemblablement de porter préjudice aux relations intergouvernementales.

(Ordonnance no P-630)

  • La Commission a statué qu'une proposition de règlement entre la Première nation de Golden Lake, le gouvernement du Canada et celui de l'Ontario, reçue par le gouvernement provincial, était visée par cette exception. Elle s'est dite convaincue qu'il s'agissait de négociations délicates et confidentielles et qu'une divulgation intempestive risquerait de causer un préjudice. Elle a jugé en outre que des négociations entre le Canada et l'Ontario étaient intergouvernementales par nature.

(Ordonnance no P-236)

  • La communication de la correspondance échangée entre un avocat du ministère du Procureur général et le ministère du Grand chancelier britannique au sujet de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants risquerait vraisemblablement de porter atteinte aux relations intergouvernementales.

(Ordonnance no 123)

  • La correspondance échangée entre des cadres supérieurs des ministères de la justice de deux gouvernements au sujet de questions extrêmement délicates et controversées peut être soustraite à l'obligation de divulguer.

(Ordonnance no P-388)

  • Aux fins de l'application de cette disposition, il ne suffit pas que la communication de documents risque de porter préjudice aux relations entre l'industrie minière et les gouvernements fédéral et provincial. Il faut que le préjudice touche les relations intergouvernementales.

(Ordonnance no P-435)

  • La possibilité que la communication d'un document porte atteinte aux relations entre le secteur privé et le gouvernement échappe à la disposition. Le préjudice doit atteindre les relations intergouvernementales.

(Ordonnance no P-263)

  • L'alinéa 15b) [LAIPVP] vise à assurer la fluidité des échanges de renseignements entre d'autres gouvernements ou leurs organismes et des institutions gouvernementales de l'Ontario, dans l'accomplissement de leurs fonctions «gouvernementales» respectives, mais il ne s'applique pas aux documents fournis à une institution par Revenu Canada, lorsque les relations entretenues par les parties sont des relations perception-acquittement.

(Ordonnances nos P-304, M-128, M-221 et P-627)

  • Les conditions prévues par la disposition peuvent être remplies lorsque des renseignements sont implicitement reçus à titre confidentiel. L'institution doit néanmoins donner des preuves suffisantes que les renseignements ont été reçus à ce titre.

(Ordonnance no P-368)

  • Les renseignements compilés par la Gendarmerie royale du Canada au cours d'enquêtes visant l'auteur de la demande relativement à des infractions d'incendie criminel et de fraude sont fournis à titre confidentiel au service de police provincial. Les documents sont ensuite transmis au procureur général pour qu'il intente des poursuites. Les conditions d'application de l'exception sont remplies dans ce cas parce que la GRC est un organisme d'un autre gouvernement et que les documents ont été reçus à titre confidentiel. Le caractère confidentiel des documents est demeuré inchangé lorsque le service de police les a transmis au procureur général.

(Ordonnance no M-151)

  • Les dossiers fournis par le ministère de la Défense nationale (DN) à un municipalité pour la préparation d'une exposition publique de matériel militaire ne sont pas couverts par l'exception. Au moment où les documents ont été fournis à la municipalité, il n'a pas été question de les maintenir confidentiels. Les documents portaient sur des manifestations passées, et ils avaient, à un moment donné, été remis aux personnes qui avaient organisé ces manifestations. Même s'il a été question de confidentialité dans des rencontres subséquentes avec DN, la Commission a jugé que le critère des «renseignements confidentiels confiés par un autre gouvernement» n'était pas rempli.

(Ordonnances nos M-128 et M-363)

  • Des imprimés informatiques portant sur les antécédents criminels de l'appelant avaient été obtenus électroniquement du Centre d'information de la police canadienne (CIPC). Les données colligées par le CIPC sont constituées de renseignements provenant de divers services de police, y compris des sources non fédérales. La GRC est chargée d'administrer et d'entretenir le système, mais ses fonctions ne font pas d'elle la source unique de tous les renseignements qui s'y trouvent. Seuls les renseignements repérés qui ont initialement été fournis au CIPC par la GRC peuvent être considérés comme ayant été «confiés» par la GRC. En l'espèce, les renseignements obtenus du CIPC avaient été initialement fournis par le service de police local lui-même; ils n'étaient donc pas protégés par l'exception.

(Ordonnance no M-202)

  • Les documents confidentiels confiés à la police par divers organismes du gouvernement du Canada, de l'Ontario et des États-Unis peuvent bénéficier de cette exception. Ces documents émanaient de la GRC, du ministère fédéral des Affaires étrangères et du ministère fédéral de la Justice, duministère du Solliciteur général et du ministère du Procureur général de l'Ontario ainsi que de corps policiers américains.

(Ordonnance révisée no R-970003, annulant l'ordonnance noP-1406)

  • Les relations entre le Canada et l'Ontario qui étaient reflétées dans des dossiers relatifs à un règlement de revendications foncières ou à des négociations avec des groupes autochtones étaient de nature intergouvernementale dans cette affaire. L'exception de dossiers dont la communication pourrait vraisemblablement porter préjudice à la conduite de relations intergouvernementales s'applique aux dossiers liés à ces négociations nonobstant le fait que le gouvernement fédéral n'est peut-être pas l'initiateur ou le destinataire de ces dossiers. L'agent enquêteur a jugé que la communication de dossiers relatifs aux négociations de revendications foncières porterait préjudice à la conduite des relations intergouvernementales en compromettant l'hypothèse de confidentialité sous-tendant les négociations et en ayant un effet dissuasif sur de futures négociations de revendications foncières et sur la disposition des autres parties aux négociations à échanger des renseignements sur les revendications foncières avec le gouvernement ontarien. (Voir également Ordonnances provisoires P-1620 et 1621, 7 octobre 1998.)
Jurisprudence citée

Risque vraisemblable de préjudice

À l'échelon fédéral

Canada (Commissaire à l'information) c. Canada (Premier ministre), [1993] 1 C.F. 427 (1re inst.)

Northern Cruiser Company Limited c. R. (12 septembre 1991), no.T-109-90 (C.F. 1re inst.); confirmé par la Cour fédérale d'appel, (28 août 1995), A-1039-91

Merck Frosst Canada Inc. c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social (1988), 20 F.T.R. 73 (1re inst.)

Canada (Commissaire à l'information) c. Canada (Premier ministre), [1993] 1 C.F. 427 (1re inst.).

Matol Botanique International Inc. c. Canada (Ministère de la Santé nationale et du Bien-être social) (3 juin 1994), no T-2916-90 (C.F. 1re inst.)

Piller Sausages and Delicatessens Limited c. Ministre de l'Agriculture at al. (1987), 14 F.T.R. 118 (1re inst.).

Air Atonabee Ltd. c. Ministre des Transports, (1989), 27 F.T.R. 194, à la p. 216.

Canada Packers Inc. c. Canada (Ministre de l'Agriculture), [1989] 1 C.F. 47 (C.A.).

Ottawa Football Club c. Canada (Ministre le la Condition physique et du Sport amateur), [1989] 2 C.F. 480, 24 F.T.R. 62, 23 C.P.R. (3d) 297 (C.F. 1re inst.)

Ruby c. Canada (Solliciteur général, GRC), [2000] A.C.F. no 779, 8 juin 2000 (C.A.)

États-Unis

State c. City of Cleveland, Civil no 59571 (Ohio App. 27 août 1992), al. 149.43a)(2)d)

Fisher c. États-Unis DOJ, 772 F. Supp. 7 (D.C. Col. 15 août 1991) 

Founding Church of Scientology, Inc. c. NSA, 197 App. D.C. 305, 610 F.2d 824, 831-32 (D.C. Cir. 1979)

Sirota c. CIA, 3 G.D.S. par. 83,261 (S.D.N.Y. 1981) (citantFensterwald c. CIA, 443 F. Supp. 667 (D.D.C. 1978)).

Préjudice la conduite par le gouvernement du Canada des affaires fédéro-provinciales

Ontario

Ordonnances nos 87, 123, 210, P-236, P-270, P-263, P-293, P-304, P-368, P-388, P-435, P-627, P-630, M-128, M-151, M-202, M-221, M-363

Notes

1. Voir Ruby c. Canada (Solliciteur général, GRC), [2000] A.C.F. no 779, 8 juin 2000 (C.A.).

2. Northern Cruiser Company Limited c. R. (12 septembre 1991), no T-109-90 (C.F. 1re inst.); confirmé par la Cour fédérale d'appel (28 août 1995), A-1039-91

3. Merck Frosst Canada Inc. v. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social (1988), 20 F.T.R. 73 (1re inst); Commissaire à l'information du Canada c. Premier ministre du Canada, [1993] 1 C.F. 427 (1re inst.).

4. Piller Sausages and Delicatessens Limited c. Ministre de l'Agriculture (1987), 14 F.T.R. 118 (1re inst.).

5. Ibid.

6. Canada (Commissaire à l'information) c. Canada (Premier ministre), [1993] 1 C.F. 427 (1re inst.).

7. Air Atonabee Ltée c. Ministre du Transport, (1989), 27 F.T.R. 194 à la p. 216.

8. Air Atonabee, ibid.

9. State v. City of Cleveland, Civil no 59571 (Ohio App., 27 août 1992). L'alinéa 149.43 (a)(2)d) de l'Ohio Public Records Actprévoit une exception à l'égard des renseignements qui pourraient mettre en danger la vie ou la sécurité d'un employé des forces de l'ordre, d'une victime d'acte criminel, d'un témoin ou d'une source confidentielle de renseignements. Les intimés avaient invoqué cette exception à l'égard de documents concernant l'identité d'informateurs. Le tribunal a reconnu que la sécurité physique des informateurs qui ont transmis des renseignements à la police est sérieusement menacée lorsque ceux-ci sont en prison. Toutefois, quand l'identité d'un informateur est révélée parce qu'il témoigne dans un procès, il est douteux que sa sécurité puisse être accrue par la suppression de parties des documents le concernant.

10. Fisher v. United States DOJ, 772 F. Supp. 7 (D.C. Col, 15 août 1991). Dans cette affaire, le demandeur soutenait principalement qu'une grande partie des renseignements demandés avaient été communiqués aux médias et qu'il avait donc droit d'y avoir accès. Toutefois, il n'a pas établi que le traitement de la nouvelle par les médias résultait de la divulgation par le gouvernement des renseignements à la presse pas plus qu'il n'a démontré que l'information refusée avait fait l'objet d'une publicité si répandue qu'elle pouvait être divulguée sous le régime de la FOIA. Voir Founding Church of Scientology, Inc. v. NSA, 197 App. D.C. 305, 610 F.2d 824, 831-832 (D.C. Cir. 1979). En outre, la Cour a jugé qu'en supposant même que l'information refusée avait été publiée dans les journaux, il ne convenait pas de la divulguer car toute communication par une source officielle de renseignements déjà divulgués par une source non officielle a pour effet de confirmer les renseignements non officiels et peut donc causer préjudice à des tiers. Voir Simmons v. Dep't of Justice, 796, F.2d 709, 712 (4th Cir. 1986) ([TRADUCTION] «les renseignements communiqués par une source officielle confirment naturellement l'exactitude de l'information coulée auparavant».) De plus, la communication publique de quelques renseignements n'oblige pas nécessairement à divulguer des renseignements supplémentaires légitimement visés par une exception. Sirota v. CIA, 3 G.D.S., paragraphe 83,261 (S.D.N.Y. 1981) (citant Fensterwald v. CIA, 443 F. Supp. 667 (D.D.C. 1978)).

Le demandeur avait prétendu également que des renseignements refusés avaient été divulgués pendant le procès de seize semaines qu'il avait subi comme codéfendeur. Il a cependant été incapable d'indiquer un seul des documents refusés en totalité ou en partie par les défendeurs qui pouvait entrer dans cette catégorie, et il n'a pas pu établir qu'un quelconque renseignement refusé avait fait l'objet d'une publicité si répandue qu'il pouvait être divulgué sous le régime de la FOIA. Voir Founding Church of Scientology, Inc. v. NSA, 610 F.2d aux p. 831-832.

11. Voir Canada Packers Inc. c. Canada (Ministre de l'Agriculture), [1989] 1 C.F. 47 (C.A.), où la Cour a jugé que la preuve n'étayait pas la crainte de l'appelante d'être traitée de façon partiale par la presse, pas plus qu'elle n'établissait d'effets négatifs découlant de la couverture médiatique, et elle a rejeté la preuve d'articles antérieurs, lesquels portaient sur des produits plutôt que sur l'état des usines, ce qui était le sujet du document en cause. Voir également Ottawa Football Club c. Canada (Ministre de la Condition physique et du Sport amateur), [1989] 2 C.F. 480; 24 F.T.R. 62; 23 C.P.R. (3d) 297 (1re inst.), où la Cour a conclu que puisque la plupart des renseignements contenus dans les documents demandés avaient déjà fait l'objet de reportages journalistiques, leur communication ne risquait pas vraisemblablement d'occasionner de préjudice supplémentaire.

12. Voir Matol Botanique International Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (3 juin 1994), no T-2916-90 (C.F., 1re inst.). La Cour a jugé que parfois les médias faisaient preuve de partialité en informant le public, mais qu'elle ne pouvait présumer de leur mauvaise foi sans disposer d'éléments de preuve allant dans ce sens.

13. Dans Ottawa Football Club, précité, le juge a considéré que le document avait 3 ans lors de la divulgation du document, qui résulterait d' un préjudice. Dans Ruby c. Canada (Solliciteur général, GRC), [2000] A.C.F. no 779, 8 juin 2000 (C.A.), la Cour d'appel fédérale a renversé la décision de la Cour de première instance de [1998] 2 C.A. 351 à l'alinéa 22(1)b) de la Loi sur la protection des renseignements personnels (L'équivalent de l'alinéa 16(1)c) de la Loi sur l'accès à l'information), que l'age et l'événement décrit dans le document pourrait encore nuire au processus d'enquête. La Cour d'appel a ordonné la Cour de première instance de reconsidérer "si la divulgation de l'information, particulièrement le document daté de plus de 20 ans, pourrait raisonnablement nuire aux activités destinées à faire respecter les lois et la détection d'activités hostiles ou subversive, et par conséquent, SCRS avait des motif raisonnable de refuser la communication de ces renseignements. (au paragraphe 100, italiques ajoutés)

14. Canada Packers Inc. c. Canada (Ministre de l'Agriculture), [1989] 1 C.F. 47 (C.A.).

15. Ordonnance P-263 de l'Ontario.

 

 

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